Berceau du Monde
2023
Berceau du Monde est une installation de peinture panoramique immersive.
L'oeuvre constitue de sept sommiers-lit peints, suspendus par cordes tressées. Elle met le spectateur face aux effets du Plantationocène et ses pratiques néo-coloniales sur l'état actuel du monde. Tranchant sur les lattes de sommiers des animaux et peuples representant des colonies ou anciennes colonies européennes qui subissent aujourd'hui des ravages écologiques et humains.
Le projet comprend plusieurs tableaux qui soulignent les défis environnementaux mondiaux. Le premier tableau, "Calliste superbe", met en lumière la menace pesant sur cet oiseau de la forêt amazonienne. "Madagascar" explore les conséquences de la dégradation environnementale sur l'île. "Terra" dépeint la tragédie des peuples autochtones face aux politiques gouvernementales. "Exode" représente les déplacements forcés des communautés. "Mariana" dénonce les conséquences de la rupture des barrages. "Mayotte" met en évidence l'écocide en cours dans cet archipel. Enfin, "Papillons de jour" évoque la disparition de ces insectes en France, soulignant l'urgence d'une action environnementale mondiale.
Créée en 2023 dans le cadre de la Résidence - Fabrique Fondation Fiminco à Romainville
Écritures sous le lit, par Daniel Nicolaevsky Maria
La Terre, notre mère, est une blessure béante. Pour l’ère des plantations de café, de canne et de coton nous avons commencé à dévorer les richesses de notre planète, tels des parasites insatiables. Parasitant transatlantiquement nos frères et soeurs avec des chaînes et des menottes. Plantant des champs sans fin pour nourrir les masses, avec pour échange le saccage des terres fertiles. Laissant derrière nous un paysage aride et dévasté. Des forêts constamment rasées, des rivières empoisonnées et l’Océan Indien devenu une décharge. Le prix de notre voracité est la destruction de notre maison commune.
Plus de sable, plus de forêts, plus de papillons de jour ou de forêt vierges. L’Amérique et les Caraïbes sont devenus la projection imaginé de l’esprit européen, ainsi le nouveau monde advient de la destruction de l’ancien. Le dépouillage de la Terre engendrant des maladies successives et la perte des ressources naturelles. Rivières et mers meurent chaque jour au nom de la légitimité du pouvoir au régime.
La cage est devenu monde et le monde, le vide.
Nous nous retrouvons donc coincés entre deux couches temporelles, une passée et une future. Piégés insidieusement dans un vieux noeud archaïque bien connu, et pourtant ancré dans le moment présent. Nous ne voyons qu’à travers une étroite fente à l’horizon un futur à reconstruire.
L’intellect, les espaces, et même les esprits sont maintenant affaires politiques et propriétés d’états destructeurs. Des corps et des âmes coincés dans un monde qui lui ont été imposés par la paranoïa de l’ancien pouvoir. De sa perte de legitimité, de sa perte de force. Le poids des nouvelles terres, créés suite aux ruines de l’ancien monde, pèse sur nous.
Faisons éclore un nouveau monde complet et entier, non plus fragmenté, non plus à moitié vif. Colorié.
Comprendre l’importance de chaque espèce humaines et non-humaines, visible et invisibles. Faire surgir de ses entrailles les clés pour une demeure légitime à tous vivants. Mais sommes-nous capables de dépasser le pessimisme anthropologique qui nous pousse à l'apathie collective?
Comment ne pas se soumettre à la contamination de la destruction en cours et prendre le dessus sur notre esprit et nos imaginaires? Se tourner vers la force du commun, du repos et du rêve pour créer ensemble, notre maison.
Ne serait-il pas simplement humain de surmonter les difficultés et de se réinventer depuis notre vide intérieur ? N’avons nous pas, ici, survécus la pandémie du siècle? Capables de déambuler à travers cette fente. Le devenir réel du monde que nous voulons contruire semble proche.
Le profit par l’exotisation idyllique du sud global, avec ses promesses religieuses sur un éden fictif a conduit les groupes indigènes à être délibérément exclus et opprimés par des mécanismes étatiques qui ont profité aux pouvoirs régionaux et coloniaux de la transatlantique.
Le bois vendu illégalement en provenance de Guyane et du Brésil a le destin ironique de créer des parquets en Amérique du Nord, et alimente l’industrie du ready-made en Europe transformant les forêts en meubles de jardin et accessoires de literie. Si les constructions modernes ont le pouvoir de bâtir le temps, la provenance des ressources naturelles construit-elle des demeures ou des cercueils?
La dé-construction des symboles catégoriques de notre société, révèle la nature fragmentée et fragile des visions défendues par les États-nations et les religions institutionnalisées. Mais qu'est-ce que nous construisons réellement ? Nous essayons d'avancer ensemble vers la création d'une société écologique, et cette réalité nous vise au cerveau. Cependant, nos idées préconçues et fermées ne permettront pas de progresser politiquement. Nous devons éviter de construire une société sans vie, mais pourquoi marchons-nous dans cette direction?
Comment éviter la destruction de cultures?
Notre origine est inéluctable, mais nous conservons le pouvoir de décider de notre destination future.
Nous devons renouer notre rôle de gardiens de notre atlas, embrasser ensemble l’imaginaire onirique tout en renouant des liens avec un passé dont le futur aura été coupé à un moment de notre histoire. Utilisant des formes de réflexion collective et de système-d’esprit-terre que nous avons semé il y a bien longtemps afin d’ériger notre terraforma à nous. Écouter les murmures de notre niche et honorer ses rythmes, ses cycles. Comprendre que nous sommes dans le même cycle qu’un papillon de nuit aux yeux ouverts, qui se pose sur d’autres racines, en semant la vie pour avancer vers son cycle de transformation.
Fiche Technique :
Œuvre réalisée par : Daniel Nicolaevsky Maria
avec l'assistance de : Anthony Clergue, Marcelo Porto, Eliote Bizarro-Huynh, Melina Barbault, Pabllo & Pixel
Création Sonore : Alonso Martinez
Créée en 2023 dans le cadre de la Résidence - Fabrique Fondation Fiminco à Romainville.